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C’est la Bérézina !

Je viens de quitter un lieu auquel je suis fidèle depuis mes 17 ans, un village au creux de douces collines. C’est un lieu fondateur pour moi, un écrin de verdure où réside – et ou converge car tous n’y vivent pas – une bonne flopée d’amis, liés entre autres par l’activité d’une association, « Les Nouveaux Troubadours », faisant vivre la culture et l’art en milieu rural. Expositions, musée d’Arts Buissonniers, construction insolite, théâtre, musique, conférences, cirque, marionnettes, littérature…colos et chantiers, tout y est (et j’en oublie) ! J’y ai atterri par hasard comme bénévole sur le chantier un été, puis y suis devenue animatrice puis directrice de camps itinérants quelques années et, de fil en aiguille, je n’ai plus cesser d’y aller et retourner, encore et encore. Un endroit captivant. Ne vous méprenez pas, je ne compte pas transformer ce blog d’expressions en http://www.jeracontemavie.com ou en tranche de pub pour mes amis mais je l’évoque ici comme introduction à ce post sur l’expression « C’est la Bérézina ! » car dans ce village hors du commun, ces personnes que j’affectionne particulièrement ont monté une fanfare, il y a quelques années, et l’ont nommée… »La Bérézina ». Les ayant vu jouer pour les 30 ans de l’association, il y a une semaine, m’est donc venue l’envie d’expliquer ici l’origine de cette drôle d’expression que nous utilisons souvent.

Bérézina – « Oui mais quand ? » s’exclament les curieux qui n’ont pas toutes les dates historiques en tête et ne connaissent pas cette référence – française il faut bien l’admettre. Quand on dit « C’est la Bérézina ! », c’est que tout va mal. C’est le chaos, le désastre, la catastrophe. Les conséquences seront à la hauteur de la débâcle. – « Oh, mais pourquoi ? », demandez-vous encore ! (vous avez vu, j’aime bien faire les voix off…;-)). Cela est lié à Napoléon et à ses invasions européennes. Au printemps 1812, Napoléon Ier lance en effet sa grande Armée à l’assaut de la Russie. Les 500 000 hommes encerclent l’armée russe après avoir franchi le Niémen. Le tsar, conscient de ne pouvoir vaincre l’empereur lors de ces combats décide de pratiquer la tactique de la terre brûlée : Moscou est en flammes lorsque les hommes y arrivent en septembre, et il n’y a donc pas de quoi ravitailler et nourrir toutes ces personnes et les animaux, et le froid arrive.

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Extrait de la BD « Champs d’honneur – la Bérézina » – Gloris, Parma

Napoléon décide donc de battre en retraite. Or, l’hiver glacial – mais aussi le harcèlement des Russes – va rendre l’expédition particulièrement périlleuse : fin novembre, la Grande Armée se retrouve face à la Bérézina – une rivière biélorusse  – charriant de la glace. Le général Éblé fait construire deux ponts de bois mais l’armée française a les Cosaques à ses trousses ; résultat : moins de la moitié des assaillis ont pu traverser, tandis que les retardataires ont tenté de traversé la rivière glaciale ou se sont fait emprisonner par les Russes : une véritable Bérézina !

De cette déroute historique majeure vient notre expression pour parler d’un échec cuisant ou d’une situation catastrophique.

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Le terme donne aussi son titre au livre de Sylvain Tesson – un auteur de voyage que j’affectionne aussi particulièrement : il y décrit l’expédition de Moscou aux Invalides à Paris qu’il a faite avec ses amis en side-car, retraçant l’itinéraire de la Grande Armée. Une façon bien à lui de commémorer le bicentenaire de la retraite de Russie. J’ai hâte de lire cette expédition de plus de 4000 kilomètres, certainement ponctuée de mille et une petites ou grandes Bérézina…

Quant à mes amis fanfarons, qui portent le chapeau cosaque (le papakha) et des vêtements rayés noirs et blancs, ils n’ont pas choisi de se nommer ainsi en vue de mauvaise augure pour leur troupe, mais sans doute parce que leur musique vient résolument de l’Est : Caucase, Russie, Balkans…mêlée à des influences locales, d’où leur dénomination d’origine contrôlée de « fanfare slaveyronnaise »…;-)

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La Bérézina – fanfare slaveyronnaise

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Un peu de gestuelle…

Isabelle Adjani 2 Isabelle Adjani – actrice française d’origine algérienne par son père et bavaroise par sa mère pour celles et ceux qui ne la connaîtraient pas, disait :

« Dès qu’on parle une langue étrangère, les expressions du visage, des mains, le langage du corps changent. On est déjà quelqu’un d’autre. »

C’est pourquoi je vous propose aujourd’hui quelques petites vidéos pour vous familiariser avec la gestuelle assez typique des Français, associée à quelques expressions courantes ou familières qui vous seront utiles lors de vos prochains échanges (c’est-à-dire, si vous avez perdu le mot ou l’expression, vous pourrez au moins faire le geste ! ;-)) :

  • Gad ElmalehL’humoriste Gad Elmaleh explique à un journaliste américain quelques gestes des Français et la fameuse « tradition » des bises (en anglais avec sous-titres) : Gad Elmaleh explique la gestuelle des Français (je viens de m’apercevoir que je l’avais déjà postée sur FrancofiLs, bon, c’est pas grave vous l’aurez donc en double…)
  • Une autre vidéo, en français cette fois (mais avec des locuteurs au charmant petit accent anglais) illustre bien également ces gestes si répandus : gestes et dialogues

gestes

  • Sur le site de Lucarnefle, on trouve également des fiches pédagogiques à partir d’une publicité amusante d’ Air Liberté où une hôtesse de l’air accompagne par des gestes – comme à l’accoutumé dans l’avion lors des instructions que personne n’écoute vraiment d’ailleurs – des propos hilarants…Puis, il y a un montage avec la gestuelle liée à quelques expressions (vous verrez qu’on retrouve souvent les mêmes d’une vidéo à l’autre) pour bien fixer ces gestes.
  • Si nous avons des lecteurs de FrancoFils anglophones, cette vidéo devrait vous intéresser : il s’agit d’une nouvelle explication, principalement en anglais, où une jeune femme explique assez visuellement et clairement des gestes courants et leurs équivalents linguistiques (en français donc cette fois), tout en faisant quelques comparaisons interculturelles entre nos gestes et ceux des anglais (et vu les résultats de la recherche sur la toile, il semblerait que nos gestes intriguent principalement outre-Manche !), : Gestes français
  • Finalement, si vous voulez réviser les gestes et retrouvez les expressions correspondantes apprises avec les vidéos antérieures, vous pourrez vous entraîner avec cette dernière vidéo : Gestuelle française sans sous-titres

gestuelle française

Voilà, c’est à votre tour maintenant !

Et cet été si vous en avez l’occasion , n’oubliez pas de bien observer vos interlocuteurs et gesticulez allégremment pour communiquer ! 🙂

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Vivre d’amour et d’eau fraîche

Ce n´est pas le printemps, les petits oiseaux et tout le tralalala qui me font aborder les expressions idiomatiques liées à l´amour aujourd’hui. (D´ailleurs il pleut à verse et ça ressemble plutôt à l´automne par ici…). Non, c´est plus stoïquement le programme de 5ème année et la dernière ligne droite de cours qui s´achève sur le thème des relations, des sentiments, de l´amour et du désamour…Alors, n´ayons pas peur, parlons-en et allons voir quelles expressions imagées colorent ce territoire mystérieux et fascinant.

On va commencer par les catastrophes (stratégie pour aller du pessimisme vers l’optimisme…) :

  • Se prendre un râteau : se dit quand quelqu´un est rejeté par la personne qu´il désirait séduire / conquérir. « Alex voulait sortir avec Agathe mais il s´est pris un râteau, elle n’avait pas du tout les mêmes intentions que lui ! ». Ça doit faire mal de se prendre un râteau, métaphoriquement comme littéralement, mais Alex peut se consoler en faisant un brin de jardinage…et il se remettra peut-être à papillonner joyeusement, à butiner de fleur en fleur (= aller d’une histoire à une autre, avec légèreté).

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  • Poser un lapin : Alors là imaginons que ledit Alex ne s´est pas pris de râteau (enfin pas encore…), est sur une bonne piste avec la fille qui lui plaît et après un échange de messages enflammés, ils décident de se donner rendez-vous. Or, la belle, inconstante et indécise, lui pose un lapin. Elle ne vient pas au rendez-vous en d’autres termes. Un peu difficile à justifier à notre époque avec toute la technologie et les systèmes de messagerie dont on dispose mais ça reste possible…avec les indécis.

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  • Se faire larguer : une autre forme passive qui intrigue les étudiants (« se faire+infinitif »), cette expression va donc leur plaire (l´acte en lui-même un peu moins par contre…). « Antoine s´est fait larguer par sa copine ce week-end, elle ne le supportait plus ! ». Évidemment, on peut abandonner la forme passive pour être acteur de cette décision de rupture : « Jeanne a largué Antoine ce week-end, elle en avait trop marre ! ». Mais la personne quittée a parfois cette sensation de dénigrement obscur qui relègue son estime de soi à 3000 lieues sous terre… ; cela me rappelle une amie, pourtant vraiment charmante et adorable, qui un jour me racontait ses malheurs avec un garçon dont elle était tombée amoureuse et avec qui elle avait eu une brève histoire, et qui avait terminé son récit par ces mots : « Enfin bref, total, il est parti et je me suis fait jeter comme une vieille chaussette« . Et moi, riant de l´expression au lieu d´empathiser (la super copine…! Bon, on avait 24-25 ans et on en avait vu d’autres…) et finissant par lui dire « Allez, viens là ma vieille chaussette, je vais essayer de te recoudre ! ».

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    image-blog-Belzaran

    Au passage, l´expression « Un(e) de perdu(e), dix de retrouvé(e)s ! » peut aider à raccommoder les « vieilles chaussettes »…! 😉 Même si je l’ai toujours trouvé un peu cynique ce dicton (car si on est vraiment amoureux/se, on ne peut pas imaginer que la seule personne qui compte vraiment à nos yeux puisse être remplacée par 10 autres potentiels amoureux) mais ça c’est une question de point de vue (et de degré de relation, sentiments…). J´avoue être plus du côté de Lamartine et de son « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé »…

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    image-Sarah-Stymans

  • Casser : « Pierre et Marie ont cassé« . Mot familier équivalent à « rompre », « se quitter », « se séparer ».  Sauf que dans ces derniers verbes il y a là encore une volonté assumée « Ils ont rompu, ils se sont séparés, se sont quittés… », alors que la curiosité avec le verbe « casser », c´est qu´on a envie de demander « Mais ils ont cassé quoi ? » Et bien…leur relation, leur histoire. Enfin après, vous pouvez aussi « vous casser » (« Bon j’me casse, j´en peux plus » = « je pars » ; « Casse-toi de là ! » = « Va t´en ! ») ou encore tout casser chez vous – en général dans la cuisine – si vous faites…

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  • une scène de ménage ! la bonne scène de ménage à l´italienne où les assiettes volent et les verres se brisent contre les murs (on ne voit ça que dans les films j´espère !). « Mon Dieu, Antoinette a encore fait une scène à Gérard parce qu´il est rentré à 3 heures du matin sans explication ». Remarquez cette contradiction : on dit facilement « le vase s´est cassé » (comme s´il s´était cassé tout seul comme un grand) tandis que deux personnes « cassent ». On ne précise pas que dans cette rupture, ils se cassent peut-être un peu eux-mêmes alors que l´on admet facilement qu´après autant de mésaventures….
  • on a le coeur brisé : « Apolline a le coeur brisé, son amant l´a quittée pour une autre, plus jeune, plus jolie… », « il lui a brisé le coeur en lui disant qu´il ne l´aimait plus ».

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C´est triste mes histoires, ça se voit qu´il pleut, revenons au début alors ou aux événements joyeux de l´amour :

  • Avoir un coup de foudre : littéralement « être touché par la foudre », se dit lorsque l´on tombe amoureux/se au premier regard, à la première rencontre. « Dès que Max a aperçu Julie dans l’avion, il s´est senti chavirer, il a eu un véritable coup de foudre » ou, plus poétiquement, citons  Racine :
    « Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
    Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;
    Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
    Je sentis tout mon corps, et transir et brûler.
    Je reconnus Vénus et ses feux redoutables (…) »

    (Avouez que Phèdre, ça a plus de « gueule » que mon histoire d´avion…)

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  • Toujours dans le domaine « électrique », on peut – de façon un peu moins radicale et puissante, « flasher » sur quelqu´un. Cela traduit aussi l´immédiateté de l´émotion « Ils se sont rencontrés dans une soirée, il a tout de suite flashé sur elle » mais dans ce cas c’est plutôt le fait que la personne vous plaît de façon instantanée, que vous avez comme une illumination mais c´est peut-être plus de l’ordre du désir alors que le coup de foudre implique de tomber amoureux presque irrémédiablement. En gros, on peut flasher puis « déflasher » un peu plus tard alors qu´avec la foudre on a un peu plus de mal à se relever quand-même….
  • J´en profite pour préciser qu´en France on « tombe amoureux » tandis qu´au Québec on « tombe en amour », ça nous touche beaucoup cette expression (alors qu´elle est l’équivalente de l’anglais finalement). Enfin dans tous les cas « on tombe », ça suppose donc que ça fait un peu mal…De la même façon, on dit : « elle est tombée enceinte de son premier enfant à 23 ans » par exemple, comme s´il s´agissait d´un pur hasard, ce qui est un peu comique quand-même de nos jours…
  • Taper dans l´oeil de quelqu’ un : Ça aussi ça a l´air de faire mal dit comme ça mais quand vous avez tapé dans l’oeil de quelqu´un, c´est que vous lui plaisez beaucoup, qu´il/elle a flashé sur vous et a du mal à penser à autre chose.
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Toutes les expressions qui suivent ont le même sens :

  • Avoir le béguin pour quelqu´un, avoir un faible, en pincer pour quelqu´un : elles traduisent  toutes une attirance envers quelqu´un, cela peut être passager (le printemps…), cela peut être le début d’une histoire tout simplement…et cela peut ne pas être réciproque aussi malheureusement. « Paul n’arrête pas de tourner autour d’Aya, il a un faible pour elle, c´est évident ! »  ; « T´en pinces pour ce mec, hein ?  » – « Oui mais il est déjà pris ! »

béguin

  • Ah, l´expression « il est pris », « elle est prise », il faut peut-être aussi en dire un mot : quand quelqu´un est déjà engagé dans une relation et donc, supposément, « non disponible ». On peut dire aussi « Elle est casée », « il est maqué » dans le langage familier. « Maqué(e) » est horrible d´ailleurs quand on se penche sur l´origine de ce mot argotique puisque cela vient de la relation « souteneur/prostituée ». Quant à « casé(e) » ou « se caser avec quelqu’un », ce n’est pas très exaltant non plus car j´imagine que cela signifie « se mettre dans une case » ou cocher la case « se mettre en couple » en somme. Bof…

Allons dans les extrêmes, le romantisme pour se donner du baume au coeur :

  • Être fou amoureux, folle amoureuse de quelqu´un : « L´amour rend aveugle » dit le proverbe et peut mener aussi à une forme de folie. Quand vous êtes fou amoureux, c’est que vous l’êtes passionnément, folie ou non. On n´est pas tièdes dans l´amour…
  • Vivre d’amour et d´eau fraîche : se dit quand le monde matériel n´a plus aucune importance pour vous du moment que l’amour remplit votre vie. Vous vivez de peu donc (pas de quoi célébrer votre euphorie au champagne, l’eau fraîche de la rivière suffit !).

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  • Filer le parfait amour : voilà, rien à redire, on est sur la note optimiste finale quand tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles 🙂 Vous avez trouvé votre âme soeur, votre moitié d’orange et vous vivez heureux.

Bon pour aujourd´hui, même s´il y a encore beaucoup d´expressions, je crois que ça sera tout ! La pluie n´a pas cessé, il y a largement de quoi vivre d´amour et de pluie fraîche en ce printemps peu clément mais au moins nous aurons les mots pour le dire…Et je termine par une image avec quelques expressions francophones sur le sujet que je trouve très jolies comme « avoir un kick » au Québec (=avoir le béguin pour qqn) …Car l´amour se décline sous tous les horizons et toutes les formes et c´est tant mieux !

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Cucul la praline

Livres jeunesse de Fanny Joly et Ronan Badel

Livres jeunesse de Fanny Joly et Ronan Badel

L´autre jour, je cherchais un mot dans le dictionnaire en classe et j´ai été amusée et surprise d´y voir le mot « cucul ». Je me suis souvenue alors de l’expression « cucul la praline » et je me suis mise à imaginer une réunion d’académiciens très sérieux en plein débat sur l’intégration du mot « cucul » dans le dictionnaire et de l´expression « cucul la praline ».

« Tu as aimé ce film ? – Oh non c´est cucul, trop à l´eau de rose pour moi ! » – « Ce chanteur pour ados gagne plein de fric, mais alors qu´est-ce que c´est cucul la praline les paroles de ses chansons !!! »

Quelque chose qui est « cucul » c´est quelque chose qui est niais, un peu ridicule, naïf, de bons sentiments rose bonbon…Le mot vient du redoublement hypocoristique de « cul » – procédé typique pour ridiculiser quelque chose que l´on méprise,  et est parfois orthographié « cucu ». Le mot « cucul » serait apparu pendant le soulèvement de Paris mais on ne connaît pas exactement l’origine de l´expression ni la raison pour laquelle on lui ajoute « la praline » qui est un bonbon au chocolat chez les Belges et une amande caramélisée pour les Français. Bon, cela renforce l´idée de quelque chose de très « doux », édulcoré. Quand c´est cucul, c´est « bébête », quoi ! Ça me fait penser que j´ai toujours du mal à expliquer aux étudiants ce que veut dire « niais », « gnan-gnan », sans passer par les traductions (« ñoño », « cursi »). Ça me fait penser aussi que les Espagnols ont aussi, se référant à cette partie du corps, l´expression « tonto del culo », même si c´est un peu plus fort que quelqu´un qui est juste, naïvement, « cucul la praline ».

Et puis j´ai découvert, en faisant quelques recherches sur l´expression, qu´il y avait une petite héroïne en littérature infantile qui était surnommée « cucul la praline » (pauvre bichette !) et qu´on pouvait même obtenir le diplôme de la fille la plus… cucul la praline !!! Qu´on se le dise…! Bon, je ne suis pas sûre que mes étudiant(e)s soient très intéressés par cette distinction…

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En tout cas, écrire ce billet – et le lire aussi j´espère – reste une façon de mourir moins bébête ce soir, moins cucul…;-)

 

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Le fric, le flouze, la thune, l´oseille, le blé…et puis quoi encore ?

flouzeOn continue sur le thème de l´argent. Noël est passé, les factures de chauffage arrivées,  c´est la fin des soldes, on a acheté tout ce dont on n´avait pas vraiment besoin mais qui était à moitié prix, on est à sec (=sans argent), mais c´est pas grave…

D´abord, la gestuelle : dire par exemple « Ça coûte cher » ou « ça vaut un paquet de fric », sera accompagné de ce geste (on se frotte les doigts comme si on tenait une liasse de billets).gestuelle-argent

Si « l´argent n´a pas d´odeur » selon le proverbe, il a, par contre, tout un tas de synonymes dans le langage familier :

le fric (à ne pas confondre avec « le flic » = le policier), le flouze, la thune, le blé, l´oseille…

Comme pour ces deux derniers cas, les références à l´argent sont souvent liées à des aliments qui se cultivent car dans le temps, si la récolte était bonne, l´argent rentrait au foyer.

oseille« Mais l ´oseille, c´est quoi ? » m´ont demandé il y a peu mes étudiants . « Une plante qui ressemble aux épinards mais avec un goût bien différent, on fait des soupes ou des omelettes à l´oseille, c´est bon aussi avec le saumon l´oseille. » –  « ??? ». Petit cours de botanique : l´oseille, dont on n´a pas trouvé la traduction (ou si, mais ça ne nous avançait pas plus car apparemment ça ne se consomme pas par ici), c´est ce qu´il y a sur cette image à gauche. Et, côté similitude avec les épinards, si on ne dit pas « j´ai plein d´épinards » pour dire « j´ai plein d´argent » (mais « j´ai de l´oseille », oui !), par contre on trouve l´expression « Mettre du beurre dans les épinards » quand on gagne un petit supplément d´argent et qu´on peut améliorer un peu le quotidien…

Un des films de Woody Allen « Take the money and run » a d´ailleurs été traduit en français par « Prends l´oseille et tire-toi » : prends-oseille

L´argent semble d´ailleurs inspirer les dessinateurs ou cinéastes. Concernant la thune, il y a une B.D et ce film également qui en porte le titre : la_thune

Le  sous-titre dit « Il n´y a pas que ça dans la vie » et, en effet, on commence à en avoir marre de mettre toujours la main à la poche et qu´on en veuille à notre fric (=devoir payer ou que l´on nous incite à dépenser), si bien qu´en France, la décroissance devient à la mode et que des associations anti-consommation ou anti-pub fleurissent un peu partout. À l´approche de la Saint-Valentin par exemple, fête jugée ultra commerciale, vous verrez ce genre d´affiches ou de tags dans la rue. Qu´on se le dise 🙂 !

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affiche-collectif-anti-pub

affiche-collectif-anti-pub

 

 

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Grippe-sou ou panier percé ?

Voilà, Noël est passé, les fêtes, l´abondance, le trop-plein, les cadeaux mais aussi les retrouvailles, la bonne chère, l´amour, l´amitié…

Ma question du jour (auquel vous n´êtes pas tenu de répondre publiquement…), c´est : côté consommation, vous êtes plutôt grippe-sou ou panier percé ?

Oui, je sais, il faut éclairer votre lanterne et éclaircir ces expressions (ce qui est heureusement est l´objectif de ce post):

– Pour le « grippe-sou », pensez à L´Avare de Molière : le titre même de la pièce vous en donne le synonyme. Le protagoniste, Harpagon est ce type d´homme « près de ses sous », dont on dirait aujourd´hui qu´il est « radin » ou « rapiat » en langage familier et pour qui « un sou est un sou ». Ce qui ne veut pas dire pour autant qu´il soit fauché ou à court d´argent (= qui n´a plus ou peu d´argent), non. Souvent, les radins sont riches, pensez à l´oncle Pic´sou. Le mot vient de « gripper » (attraper, saisir ou voler quelque chose) et « argent », car la première expression était « grippe-argent » qu´on n´utilise plus. Le grippe-sou aime bien accumuler des petits gains sordides. En tout cas, pour les grippe-sous, Noël et les cadeaux représentent un véritable enfer !

dessin-sur-le-blog-d´Adelaïde-de-Clermont-Tonnerre

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prospecteur

– Pour le panier percé, je ne sais pas de quel personnage célèbre m´inspirer, à moins que vous connaissiez ma belle-mère (mais j´en doute…). Là vous l´aurez compris, c´est le contraire: une personne qui dépense sans compter et dont l´argent lui file entre les doigts. Quelqu´un qui fait chauffer la carte bleue ! Et en période de fêtes, ça peut être ravageur…de quoi se retrouver en début d´année à découvert, sans un rond sur son compte ! (=retour à la case « fauché », « sans le sou », expliqué avant). Mais, au moins, à Noël, la personne victime de cette tendance (dont on dit alors « Untel ou Unetelle est un vrai panier percé ») aura été généreuse pour tout le monde et n´aura pas été « chiche » comme ce vieil oncle célibataire endurci qui n´offre plus que des cailloux rapportés de ses voyages aux petits de la famille (personnellement, je trouve ça très bien…!)

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dessin-sur-Linguapop

dessin-sur-Linguapop

Ici en Espagne on dit « tirar la casa por la ventana », en français ce n´est pas la maison que l´on jette mais seulement l´argent : Arrête de jeter ton argent par les fenêtres, c´est (encore) la crise !

Voilà pour votre panier d´expressions du jour (pas percé j´espère). Et puis au fait…j´oubliais mais c´est de circonstance :

Bonne année à tous 🙂 !

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Je kiffe grave ! Et vous, voulez-vous kiffer avec moi ?

image-sur-frenchspanishonline.com

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Rien de tel que de passer un week-end à Paris en express, dans un lieu aussi bondé que le salon du livre jeunesse à Montreuil, pour faire le plein d´expressions « à la mode » en ce moment dans la capitale. Ou, moins à la mode mais qu´il est plaisant de réentendre (tant cela nous rappelle notre folle jeunesse !).

Je vais donc parler aujourd´hui du verbe « kiffer » qui a plusieurs sens, mais dont le plus utilisé serait : aimer, apprécier franchement quelqu´un ou quelque chose : « Moi, par exemple, je kiffe les albums illustrés pour les enfants. Je ne kiffe pas le métro aux heures de pointe par contre. Et, vous l´aurez bien compris, je kiffe grave les expressions imagées ! . »

Ah oui, quand vous ajoutez « grave » ça fait encore plus « jeune branché », c´est l´équivalent de « beaucoup ». Tu kiffes grave mon post là ! = T´apprécies vraiment beaucoup mon article là ! (merci, c´est un plaisir ! Vous allez voir comment vous allez rajeunir de 20 ans après la

T-shirts-je-kiffe-ma-life

T-shirts-je-kiffe-ma-life

lecture de cet article et à quel point vous allez impressionner les Français en utilisant le verbe « kiffer ». N´oubliez pas cependant que c´est familier, hein ? Ne dites pas à votre supérieur hiérarchique « Je ne kiffe pas trop les heures sup, vous savez ! »).

L´origine du mot est aussi intéressante que sa signification. Argotique, le mot vient de l´arabe, recensé ainsi dans le wiktionnaire :  كيفkyf (« haschisch »).

« Haschisch ! » vous exclamez-vous ! Oui, haschich. Parfaitement. D´où le sens dérivé de kiffer = fumer du haschich et, par extension, s´amuser, prendre du bon temps : « On a kiffé samedi soir en allant dans une soirée brésilienne où on a dansé la samba ! » (sans fumer de haschich, entendons-nous bien 😉 !).

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Et puis, amoureux (ou amoureuse), vous pouvez dire à votre chéri/e : « Je te kiffe ! » = Tu me plais beaucoup.

Ce qui me plait aussi dans ce verbe (enfin, ce qui me fait kiffer je voulais dire…), c´est que c´est un mot voyageur : il est arrivé en France grâce aux vagues successives d´immigration de l´Afrique du nord, dans ce brassage multiculturel et linguistique entre langues et populations. C´est un mot « adopté » donc, qui montre toute la richesse des langues en contact, de la transformation de notre façon de parler grâce à la coexistence des personnes d´horizons et de cultures différentes. Et, samedi à Paris, il y avait justement une grande manifestation contre le racisme, problème très préoccupant en ce moment en France (dès qu´il y a une crise, les vieilles tensions raciales refont surface, c´est scandaleux). Alors, voilà, à travers francofiLs, je brandis le verbe kiffer comme banderole vers un appel à la tolérance : mes amis Abdoulaye, Mohamed, Laïla, Aya, Yasmina, Aziz….JE VOUS KIFFE ! et à travers vous nos ministres issues de l´immigration et qui sont en ce moment honteusement chahuté(e)s et vulgairement moqué(e)s, soyez sûrs du soutien de nombreux concitoyens qui vous considèrent des leurs, nous vous kiffons, nous sommes avec vous !

kiffer-les-humains

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La peau des fesses !

C´est souvent à travers nos enfants que nous prenons conscience de notre manière de parler, de nos tics de langage, voire de nos dérapages. En fidèles petits perroquets, ils répètent ainsi parfois un mot ou une expression dont l´un des parents a l´usage, sans que celui-ci n´en ait pleinement conscience par ailleurs. Quand l´enfant grandit dans un milieu bilingue, c´est encore plus drôle puisque selon la langue dans laquelle est prononcé le mot ou l´expression, un des parents réagit immédiatement (d´autant plus si le mot est grossier) et l´autre est immédiatement démasqué : « Mais c´est toi qui lui a appris ça ??? » – « Moi ??? Mais non, voyons ! » – « Mais si mais si, je vois bien, tu le dis tout le temps ce gros mot ! ».

Ainsi en va t´il de ma manie des expressions idiomatiques…Ma fille est le baromètre mesurant la fréquence et la récurrence du « top 10 » des expressions que j´utilise le plus, sans m´en rendre compte…Jusqu´au moment où, surprise, je l´entend l´intégrer à son langage, comme l´autre jour où, dans les rayons d´un supermarché je l´entendais claironner sur trois notes de musique « La peau des fesses ! La peau des fesses ! » – « Quoi ??? Que dis-tu Solenn (= prénom de ma fille) ? » – « Eh bien oui, maman tu dis toujours ça, quand je veux prendre par exemple ce paquet de biscuits de la marque-à-la-mode-chez-les-petits-car-avec-la-tête-de-cet-affreux-personnage-de-dessin-animé : « non on va pas acheter celui-là, ça coûte la peau des fesses ! » 😉

la-peau-des-fesses-dessin-d-Anneka

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L´occasion donc de revenir ici sur cette expression fort utile qui, vous l´aurez compris, signifie : Ça coûte très cher. Décortiquons-la premièrement pour ceux qui ne savent pas encore ce que sont les fesses. Voici la définition de Tv5 : fesse (nom féminin) : « Endroit charnu de la région du bassin chez l’homme et chez certains animaux« . Je préciserai – mais cela ne tient qu´à moi : « en général plus charnu chez la femme que chez l´homme » mais je ne sais pas si le sens du mot vous paraîtra plus clair, alors précisons : nous en avons deux et nous nous asseyons dessus. Le postérieur en somme. Tentons le synonyme en registre familier qui parlera immédiatement aux Catalans : le cul ! (bien que le cul est la totalité tandis que la fesse est la partie…vous saisissez la différence ?). Et ce n´est pas que je veuille tomber dans la vulgarité mais la même expression existe dans un registre plus familier : Ça coûte la peau du cul ! On peut donc apprécier le fait que j´emploie plus volontiers devant mon enfant la version « soft » de l´expression, ce que me faisait remarquer une amie hongro-suédoise revue cet été à Stockholm (où tout est affreusement cher) et parlant couramment français  : « ah oui c´est bien toi tu dis « la peau des fesses », moi je dis toujours « la peau du cul »!!! ». En fait on ne sait pas très bien d´où vient l´expression mais apparemment il fut un temps où on disait seulement « ça coûte la peau » sans préciser une zone de notre anatomie.

Autre variante synonyme pour quitter la partie basse de notre corps : ça coûte les yeux de la tête. Avouez que c´est amusant de préciser « de la tête » comme si nous avions des yeux ailleurs…Mais voilà, vous l´aurez compris, quand un Français peut s´exprimer en 7 mots plutôt que 4, il choisit toujours le chemin le plus long…;-)

Image-Cache-cash-droits-reservés

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Associer le geste à la parole

Au début de l´année, j´avais pris pour résolution de m´occuper des gestes liés à nos expressions, mots etc. En particulier ceux qui sont étranges aux yeux de nos voisins ou amis étrangers (cf « avoir un coup dans le nez » ou « mon oeil »). Aujourd´hui, peu encline à écrire de nouvelles tartines*, je vous montre le geste associé à l´expression du « ras-le-bol » dont je donnais les variations dans cet article qui remonte à l´année dernière : https://francofils.wordpress.com/2012/03/28/registres-comment-dire-estem-farts-en-francais-du-plus-formel-au-plus-familier/

Il est sans-doute assez universel mais vous pouvez réviser les expressions et, devant une glace, répéter le mouvement pour associer le geste à la parole :

ras-le-bol

ras-le-bol

marre !

marre !

Là, notre franchouillard a plutôt l´air d´un caporal. Le geste à droite est peut-être plus explicite : ras-le-bol, ras la casquette, en avoir par-dessus tout, par-dessus le marché…Il en a marre, marre de chez marre !!!
Voici une petite vidéo d´Imagiers.net (gestes de Laurent Lemercier et voix de Vincent Lefrançois) qui vous aidera à mieux visualiser les gestes : observez en particulier les gestes numéro 4 et 5. Pour le reste, on verra les expressions dans les prochains articles 😉 !

Bonus :

Écrire des tartines = écrire beaucoup, de (trop) longs textes.

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Je vous ai à l´oeil…

Toujours concernant les gestes et les expressions, un autre geste culturel bien ancré chez les francophones est celui-ci :

Mon oeil !

Mon oeil !

Je ne sais pas si le dessin est très explicite : vous tirez votre oeil vers le bas et vous vous exclamez  » Mais oui c´est ça, mon oeil ! » = « Je ne te crois pas du tout ! »

C´est une expression de doute, d´incrédulité dont l´origine est incertaine. Selon certains, cela pourrait être la forme raccourcie de l´expression « il n’y en a pas plus que mon oeil », datant de la fin du XIXe siècle et signifiant que l’oeil seul ne perçoit rien, donc ce que nous dit la personne doit être faux (personnellement je ne comprends pas cette hypothèse : si je ferme un de mes yeux, mon oeil tout seul ne devient pas aveugle pour autant, c´est une question de champ mais la perception reste plutôt bonne. L´expression est peut-être née d´un mal voyant, allez savoir !).

D´autres la mettent en relation avec l´expression « se mettre le doigt dans l´oeil » qui veut dire être naïf, faire erreur ou ne pas vouloir voir la réalité.

se-mettre-le-doigt-dans-l-oeil-sur-bonjour-de-France

se-mettre-le-doigt-dans-l-oeil-sur-bonjour-de-France

De façon plus vulgaire, quand quelqu´un ne croit pas ce que vous lui racontez, plutôt que de vous dire « Mon oeil ! », vous pourriez l´entendrez dire « Mon cul, oui ! » (d´où l´hypothèse d´autres encore sur le rapprochement métaphorique de l´oeil et de l´anus. Je n´entrerai pas dans ces considérations plus profondes…) . Mais rassurez-vous, dans ce cas, nul geste accompagnant l´exclamation ! Autre variante, une question : « Et mes fesses, c´est du poulet ? »

Là est la richesse de la langue, partir sur des sentiers aux sonorités et aux sens toujours plus escarpés et buccoliques…

Quant à « Je vous ai à l´oeil », cela signifie « Je vous surveille ! » et cette fois, le geste qui l´accompagne ne montrera pas l´oeil spécifiquement mais un doigt levé et dirigé vers l´interlocuteur indiquant l´avertissement, la menace… Incrédulités, surveillance, l´oeil c´est le siège de la confiance en somme !!! Il y en a beaucoup d´autres cependant des expressions imagées avec le mot « oeil ». Mais pour aujourd´hui on termine simplement avec un petit clin d´oeil au célèbre chat de Gelück – qui vous a à l´oeil  😉 :

Le-chat-Gelück

Le-chat-Gelück

Expression bonus : un clin d´oeilune référence, une expression de connivence. Physiquement, ceci :

emoticon clin d´oeil

emoticon clin d´oeil

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